Colloque du projet ANR AMAZ

17 et 18 janvier 2023

Mouvements politiques autochtones, dynamiques interethniques et indianité ostentatoire en Amazonie

 

MSH Mondes

Université Paris Nanterre (bâtiment Max Weber)

Vincent Hirtzel et Philippe Erikson (org.)

 

Argumentaire :

L’entrée progressive en politique des groupes amérindiens d’Amazonie à partir des années 1980 est inséparable de l’essor d’un tissu d’organisations autochtones régionales et nationales à travers lequel de nombreux groupes ont été amenés à agir ensemble, en se fédérant sur la base d’une indianité ou d’une indigénéité partagée. Ce n’est qu’à ce prix qu’il était possible de faire « cause commune », en dépit d’une considérable fragmentation antérieure, voire bien souvent d’inimitiés ataviques. À travers l’étude de cas concrets, ce colloque ambitionne d’examiner les nouvelles dynamiques interethniques entraînées par cette accession des Amérindiens à une scène politique élargie à l’échelle nationale, voire internationale. Seront examinées aussi bien les forces centripètes que les forces centrifuges qui facilitent ou entravent l’émergence de ces nouveaux réseaux d’alliances trans- ou pan-ethniques.

D’un point de vue juridique, les groupes reconnus comme amérindiens le sont tous au même titre. Néanmoins, leur poids politique autant que leur degré de militantisme n’en restent pas moins largement différenciés. On constate par ailleurs une grande diversité dans les manières d’afficher son indigénéité. Si, afin d’asseoir sa légitimité, l’on s’efforce le plus souvent de montrer qu’on est bien doté d’une langue et surtout d’une « culture » propres, les modalités concrètes de cet affichage identitaire peuvent fluctuer. Il conviendra donc de s’interroger également sur ce qui préside à la mobilisation d’artefacts ou de marques (parures, peintures corporelles, armes, vêtements) tantôt singularisantes, tantôt plus fédérantes, autrement dit à l’oscillation entre le particularisme ethnique et l’indianité générique en contexte politique.

Ce colloque visera ainsi à décrypter ce qui se trame derrière l’apparente unité des fédérations. Est-elle fortement conditionnée par l’historique des relations interethniques ? Par la mémoire des traumatismes liés à l’époque des missions, du caoutchouc, des patrons ? Est-il possible d’identifier des « styles » d’investissement politique distincts qui traduisent ou reconduisent les processus historiques régionaux ? Quel rôle (effectif ou symbolique) y occupent les groupes marqués par un isolement volontaire durable et récemment « familiarisés » ? Comment y interviennent les populations riveraines longtemps qualifiées de « détribalisées » ? Dans quelle mesure l’appropriation et l’adaptation « pour soi » d’emblèmes d’indigénéité calqués ou empruntés à d’autres groupes érigent-ils (ou non) ces derniers en modèles ? Est-il légitime de considérer que la quête émancipatrice décoloniale contemporaine, promue explicitement dans certains pays, traduit d’une certaine façon un « activisme passéiste » ?

Partant du constat que l’individuation des corps est l’un des enjeux centraux des socio-cosmologies amérindiennes, on se demandera enfin ce qu’il advient-il de cette dimension – largement mise en lumière par l’anthropologie amazoniste classique –, à l’heure où il s’agit de forger non plus des personnes mais des corps politiques, en conciliation avec l’imaginaire occidental de « nation » ? Y-a-t-il rupture, malaise, ou la possibilité d’envisager une continuité dans les groupes concernés entre l’ancienne construction de la personne par le corps et le rituel, et l’affichage d’une identité ethnopolitique par des attributs ostensibles d’indianité tournés vers les autres ?

Résumés des interventions ici

 

Programme 

Mardi 17 janvier 2023 

9h30-10h Accueil 

10h-10h30 

Vincent Hirtzel & Philippe Erikson. Introduction 

Session 1 (modération : Capucine Boidin) 

10h30-11h 

Thomas Mouriès. Le guerrier awajún et le diplomate shipibo : deux styles de la politique autochtone en Amazonie péruvienne ? 

11h-11h30h 

Chloé Nahum-Claudel. « Un village de gauche et l’autre de droite » : le factionnalisme enawenê-nawê sous l’ère de Bolsonaro 

11h30-12h00 Pause café 

12h-12h30 

Elise Capredon. Le CONPLEI, une organisation amérindienne conservatrice ? Positionnement politique, relations interethniques et indianité au sein d’une association indigène évangélique 

12h30-13h Discussion 

13h-14h30 Déjeuner 

Session 2 (modération : Irène Bellier) 

14h30-15h 

Olivier Allard & Amador Medina. Une socialité distinctive sans culture visible ? Mouvement indigène et politique électorale dans l’état Delta Amacuro (Venezuela) 

15h-15h30 

Vincent Hirtzel. Bannières militantes et costume autochtone : affichages d’indianités à géométrie variable chez les Yurakaré d’Amazonie bolivienne 

15h30-16h Pause café 

16h-16h30 

Raphaël Colliaux. « Je ne suis pas culturaliste ». Politique et autochtonie dans le district de Megantoni (Amazonie sud-péruvienne) 

16h30-17h 

17h-17h30 Discussion 

Mercredi 18 janvier 2023 

10h-10h30 Accueil 

Session 3 (modération : Paul Codjia) 

10h30-11h 

Cyril Menta. Emblèmes communs pour une indianité contrainte ? Diversités et mémoires des relations interindigènes dans le Nordeste du Brésil à partir du cas pankararu, État du Pernambouc 

11h-11h30h 

Cédric Yvinec. Être cacique général pour devenir maître des étrangers (et vice-versa) : enjeux politiques des relations entre Suruí du Rondônia (Brésil) et organisations indigénistes. 

11h30-12h Pause café 

12h-12h30 

Silvia Romio. Espoirs de « libération » et aspirations au « patronage » dans la réalité politique des Awajún (Amazonie péruvienne) 

12h30-13h Discussion 

13h-14h30 Déjeuner 

Session 4 (modération : Anne Christine Taylor) 

14h30-15h 

Clarice Cohn. Políticas e culturas:mobilizações contemporâneasdos Xikrin do Bacajá 

15h-15h30 

Jean-Pierre Chaumeil. La notion de « couloir politique autochtone » : une limite aux formes conventionnelles du politique 

15h30-16h Pause café 

16h-16h30 

Philippe Erikson. La nation pacaguara : une autonomie ethnique sous perfusion politique 

16h30-17h 

Emmanuel de Vienne. Une société plurilingue peut-elle parler d’une seule voix ? Le projet de gouvernance générale du Xingu 

17h-17h30 Discussion 

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